Les Santons de Provence


Etymologiquement, le nom de santon vient du provençal Santoun qui signifie petit saint. Le mot crèche quant à lui vient du mot crupio qui signifie mangeoire d’étable. La fête de Noël a été décidée en 354 par le pape Liberius dans le but de remplacer la fête païenne qui entourait le solstice d’hiver.

En Provence, la tradition de faire la crèche semble encore si vivace de nos jours que l’on peut sans peine imaginer que cette habitude remonte du fond des âges.
Cela est presque le cas puisque les premières représentations de la nativité figurent en Arles sur des couvercles de sarcophages paléo­chrétiens dès le IIIème siècle de notre ère...
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Tassy, Joseph (17..-1... ; peintre)
Titre [Arles. Les Aliscamps]
Publication 1797
Bibliothèque nationale de France
Gallica.bnf.fr/

Dès le Xllème siècle, on trouve de nombreuses représentations sculptées de la nativité, mais aussi de l’âne, du boeuf et des trois Rois Mages. C’est à Rome, qu’a pris naissance cette forme d’iconographie religieuse consistant à représenter les témoins de la naissance de Jésus. Ils étaient fait d'argile séché et peint à la main, ou bien de carton, papier bouilli et colle.
Les premières vraies crèches d’Eglise apparaîtront quant à elles de façon habituelle seulement au seizième siècle.

On attribue à Saint-François d’Assise, qui en 1223 souhaitait se rendre compte du dénuement de la naissance de Jésus, d’avoir pour la première fois mis en scène la nativité du Christ en mêlant personnages vivants et figurines. Les Provençaux acceptent d’autant mieux cette version que la mère de Saint-François d’Assise était originaire de Tarascon, et que par conséquent elle a certainement influencé son fils en prenant exemple sur les “Pastrages” qui se déroulaient lors de la messe de minuit et qui étaient des représentations de la Nativité jouées par des bergers.


NOEL de ST. FRANCOIS D'ASSISE

..."François obtint du pape Honorius III, le droit de fêter Noël avec un éclat particulier et selon ses idées personnelles. Il choisit Greccio parce que le seigneur du lieu, Giovanni di Velita, « qui attachait moins d’importance à la noblesse du sang qu’à celle de l’âme », avait fait don à François de la montagne couverte de bois qui dominait l’éperon rocheux de son village et le val de Rieti jusqu’aux monts bleutés s’étendant à l’horizon. Sur un aplomb de la muraille de pierre, François avait fondé un petit ermitage, utilisant comme d’habitude une des grottes que lui offrait la nature. Elle fut transformée en chapelle. Sur sa demande, on y installa une mangeoire généreusement pourvue de paille. Suivirent un boeuf et un âne, témoins exigés par la tradition. Au coeur de la nuit, les flambeaux s’allumèrent et la population d’alentour montait de tous côtés à travers les arbres, torche au poing, si bien que les sentiers de la montagne palpitaient comme des ruisseaux de lumière. Un prêtre était venu pour dire la messe qui fut célébrée sur la mangeoire devenue crèche, le « presepio » cher aux Italiens, et ce fut François revêtu de la dalmatique de diacre qui lut l’Evangile de la Nativité. La foule émerveillée par cette redécouverte du grand mystère suivait avec attention les moindres détails de la cérémonie et beaucoup crurent voir François tenir dans ses bras l’Enfant baigné de rayons. La foi du Moyen Age, plus près de l’enfance, que la nôtre, traduisait d’instinct par des visions les vérités à croire qui parlaient mieux à son coeur. Cette nuit-là était d’une douceur exceptionnelle qui ne fut jamais oubliée. Dans les bois, les frères chantaient, et les lumières luisaient doucement un peu partout comme pour se joindre à cette explosion d’allégresse inattendue et répondre à la clarté obscure du ciel. Ce fut notre messe de minuit, la première, pleine de cette poésie que seul un François d’Assise pouvait trouver."...
(Julien Green - Frère François)


Si cet épisode est difficile à vérifier, il est sûr par contre que les premières crèches d’église sont venues d’Italie.
Sous la Terreur (1793), les crèches d'église sont supprimées.
Pour perpétuer cette coutume, les crèches privées se multiplient dans les foyers.
Jean-Louis Lagnel qui vécut à Marseille (1764-1822), a l'idée de fabriquer des figurines bon marché en terre cuite pour les placer dans les crèches privées.
Les Santons, petits saints, se répandent alors dans les crèches privées.
La crèche provençale telle que nous la connaissons aujourd’hui a été révélée et adoptée par le public lors de la première foire au santons, à Marseille, sur le cours Saint Louis, en 1803. Colorés et typiques, les Santons représentent les sujets traditionnellement religieux, mais aussi tous les principaux métiers provençaux. Ces petits personnages obtiendront un succès foudroyant qui dure encore de nos jours.
Foire aux santons en haut de la Canebière.
Santonier "Beaumond"

C’est ainsi que le Brigand, Margarido, le meunier, le bohémien, l’aveugle, le Ravi et autres Pistachié figurent aujourd’hui aux cotés de Jésus, Marie, Joseph et des trois Rois Mages dans chaque crèche provençale.